Les  Sept  familles  du  WEB 

Article de Gilles KLEIN et Philippe TRETIACK paru dans le magazine ELLE n°2722 du 2 Mars 1998.   gklein@elle.fr
 


| néojournalistes | exhibitionnistes | encyclopédistes | babas bâtisseursfondus | victimes |

Néo journalistes, encyclopédistes, exhibitionnistes, babas cool, flambeurs, ils se ruent tous sur la "toile"
Ils forment la dernière généraltion des allumés d'Internet. Petit guide d'une cyber-tribu à suivre.

L'Internet c'est le dernier continent, l'eldorado, la nouvelle frontière. Sur cette planète traversée d'impulsions numériques, d'étranfes peuplades se croisent et se parasitent : golden boys, cybertaggers, arnaqueurs en tout genre, et même quelques néonazis. Alors pour s'y retrouver, voici une petite typologie de la faune exotique des internautes.



Les néojournalistes :
Ces nouveaux Rouletabille, ennemis jurés du reportage sur le terrain, n'ont qu'une source d'infos: la rumeur. A les croire, tout le monde peut jouer les Albert Londres, les "Gorge Profonde", les Monsieur propre, devenir d'un coup rédacteur en chef d'une feuille de chou.
Voici trois adresses de sites américains à vous de trouver sur la toile 3 sites francophones qui répondent à cette définition !
Le site  sur l'Affaire Lewinsky-Clinton: "The Drudge Report" a poussé le magazine Newsweek a tout cracher sur son propre site Internet  devenu sale pour l'occasion.
http://www.drudgereport.com
Harry Jay Knowies avec son look de roi Dagobert, barbe rousse, embonpoint et grosse lunettes, cet ex étudiant d'Austin au texas fait un carton à Hollywood avec son site qui réunit toutes les fuites de l'industrie du cinéma sous l'intitulé: Ain't it cool News ? C'est le Canard déchîné de la Côte ouest.
http://www.aint-it-cool-news.com
Analyses boursières de James Cramer sur wall Street:
http://www.thestreet.com


les exhibitionnistes :
Catégorie en expansion, les exhibitionnistes, les m'as-tu vu du web se distinguent en ce qu'ils ne rendent pas compte de l'info mais la font. leur plaisir : se mettre en scène à longueur de journée, vivre sous l'oeil mécanique d'un web cam. C'est un appareil numérique qui capte des images fixes à intervalles réguliers. Ainsi peut-on à loisir , jeter un coup d'oeil sur la machine à café de Canal +, sur un trottoir d'Hollywood, sur l'Everest, le home sweet home de la célèbre vedette américaine de 23 ans Jennifer Ringley.
http://www.jennicam.org


les encyclopédistes :
Compilateurs fous, ces boulimiques d'informations sont quelque fois indispensables et peut-être totalement cinglés. Exemple Gudmundur Helgason, cet Islandais de 28 ans s'intéresse aux sous marins depuis son plus jeune âge. Aujourd'hui , son site n'ignore rien de l'histoire des 1168 U-boats qui ont navigué sous pavillon allemand durant la dernière guerre, de leur équipages et de leurs commanda    nts respectifs.
http://www.uboat.net/
Un site australien lui recense toute la littérature féminine africaine de langue française. Pour le meilleur et pour le pire, car il n'y a pas que les prix Nobel.
http://www.arts.uwa.edu.au/AFLIT/FEMEChrome.html


les babas du web :
Défenseurs du réseau libre comme le bon vieil amour des années soixante, ces premiers initiés sortes de Peaux Rouges du web, n'ont qu'un credo tourner en dérision  l'esprit commerçant déferlant sur leur territoire. Apôtres de la contre culture, ces internautes sont des farceurs qui n'hésitent pas à torpiller avec irrévérence les efforts des nouveaux concurrents. En France, elysee.org, la copie non conforme du vrai site de l'Elysée, elysee.fr, fait un tabac.
http://www.elysee.org
http://www.elyséee.fr
Aux Etats Unis, The Drudge Report est plagié par The Sumurdge Report (la bavure, le remugle)
http://www.smurdgereport.com


les bâtisseurs du web :

Altruistes, ces "web doctors" à l'image de nos "french doctors" n'ont de cesse de faire le bien du réseau tout entier. Par tous les moyens ils cherchent à offrir à la grand famille des internautes des outils qui transformeront leur univers en un monde de lait et de miel.
Frédéric Cicera qui avait offert un hébergement gratuit aux internautes sur les ordinateurs de l'Université Paris VIII a créé un espace nommé Mygale. le succès dépasse rapidement ses attentes.Ils sont bientôt 6000 à se bousculer. Mais après des déboires avec l'Université, la colonie louphoque oùle peilleur côtoie le pire est priée d'aller se faire voir ailleur et c'est aujourd'hui sous le sigle multimania.com que se retrouvent les sites Mygale.
http://www.multimania.com
Autre exemple le site de Marie Plassard, maîtresse d'école de 40 ans qui ouvre en 1995 un espace pour les mômes. Cet aimable fourre tout a déjà attiré 300 000 visiteurs de plusieurs continents. Marie enchaînée à son ouvrage telle Pénélope, planche quotidiennement devant son ordinateur pour enrichir son site.
http://www.imaginet.fr/momes/



Les fondus du virtuel :
avant dernière tribu. Pour eux le monde réel n'existe déjà plus, tout passe par leur écran.
En 1994, Alain Le Dberder, ancien de France Télévision et actuel directeur des nouveaux programmes de Canal + décide avec Philippe Ulrich, animateur de la société multimédia Cryo, de créer le 2ème monde, un Paris virtuel reconstitué avec ses rues et ses principaux monuments. Il ouvre en Avril 1997 ce site qui a déjà coûté des millions de francs à Canal +.
http://www.and-world.com


Les victimes du web
L'une des premières victimes est Timothy Mac Veigh, officier de l'US Navy, il doit à sa home page sa suspension de l'armée. Il avait eu le malheur d'y exprimer un doux penchant  pour les jeunes hommes. Une épouse d'officier n'en a pas cru son web et l'a dénoncé aussi sec. le brave Tim en a pris pour son grade. Hier couvert de décorations, aujourd'hui l'opprobre, le militaire embarqué sur le sous marin nucléaire USS Chicago bataille pour sauver son uniforme.
http://www.geocities.com/Pentagon/924


Very web. Mais pendant ce temps là, les sept familles se mélangent. Gageons qu'elles donneront naissance à d'improbables refjetons que même Mc Luhan, le gourou du village global, n'aurait pas imaginés au plus fort de son délire.