Maxime NEMO à Alger Etudiant 1/03/1924 p.6 et 12 Conférence sur Albert Samain et les Symbolistes le Mardi 26 février 1924 dans la Salle des anciens élèves du Lycée d'Alger.
M.Maxime NEMO parle d'Albert SAMAIN.
Mardi 26 février dans la salle des Anciens Elèves du
lycée d'Alger, M. Maxime Nemo, créateur à Paris du
groupe d'Art et d'action "l'Ilôt" nous a entretenus d'Albert
Samain et du Symbolisme.
Ce fut certes une rare satisfaction pour le public-( une élite)
qui s'était donné rendez-vous au récital Nemo
d'entendre à la fois une causerie pleine de charme et des
poèmes les délicats ou les plus expressifs de Samain, de
Henri de Régnier, de Verlaine, de Paul Fort, dits par le
conférencier avec un art sûr et.... précieux au bon
sens du terme.
l'Association des Etudiants d'Alger ne saurait regretter d'avoir
patronné M.Maxime Nemo, venu de Paris dans le but
élevé d'initier aux joies pures des Rythmes, des Symboles
et des Formes les milieux algériens, jusqu'ici peut-être
trop uniquement portés aux jouissances plastiques du Son, de la
Ligne ou de la Couleur.En plein accord avec l'Association des anciens
élèves du Lycée et celle des Ecrivains
Algériens, elle a estimé que pour une telle action
d'intellectualité , qu'elle devait être aux
côtés de M.Nemo.
Pour ce geste, dont la valeur d'affirmation n'échappera à
personne, je tiens à féliciter le Bureau de l'Association.
Je rappelerai à cette occasion que ce n'est pas la
première fois que les étudiants donnent leur appui
à action de pure intellectualité. Et lorsque
l'Association des Ecrivains donna à l'Alhambra, l'an dernier,
une conférence sur le Mouvement Littéraire
Algérien et ses possibilités, elle était encore et
déjà aux côtés de nos artistes, de nos
poètes, de nos poètes, de nos romanciers.
Je crois qu'il y a là une heureuse, une féconde
conjonction des forces de pensée et d'Art de ce pays. C'est de
contacts fréquents et intimes comme ceux là que
naîtra la cohésion nécessaire de tous les
éléments mentaux qui élaborent l'avenir de la
Beauté et qui assurera ici l'indispensable prédominance
de la culture française.
Quant à Maxime Nemo, il faut lui serrer très
fraternellement la main en toute sympathie; le programme de son groupe,
ses buts,ses tendances, ses réalisations, sont de ceux qui
enlèvent par leur richesse d'humanité, par leur
plénitude et aussi par le courage des audacieux qui en
poursuivent la réalisation, l'adhésion enthousiaste de
tous les esprits et de tous les coeurs.
Vouloir faire communier l'âme collective dans la religion de la
Beauté intégrale, c'est là un noble
idéal,et combien aventureux en France. Mais en Algérie
c'ets plus encore que de l'audace: c'est de la vertu. Reconnaissons le
sans barguigner,sans aucune honte, mais avec quelque mélancolie:
une manifestation de pure cérébralité, notre pays
n'est pas encore mûr pour la goûter comme il convient: il
en est à l'âge heureux,béat, primaire où le
poing qui martèle une mâchoire résume toute
sa brutalité;la brutalité d'une époque et
l'inculture d'une "Humanité" indigne de ce nom.
Je n'insiste pas: ce serait trop faire voir le mérite
exceptionnel de l'action d'art entreprise par Maxime Nemo des
groupements qui l'ont compris et assisté et surtout des
auditeurs très compréhensifs dont la présence
recueillie fut pour notre ami un hommage d'une rare valeur.
Nous apprenons que M. Nemo se rend à Oran et à
Constantine où il se propose de faire goûter l'admirable
lyrisme de nos meilleurs poètes. Nos voisins plus heureux
que nous auront le plaisir d'entendre à cette occasion Mme Nemo,
qu'une fâcheuse indisposition avait retenue à la chambre,
au dernier moment.
Le 21 mars ils nous reviennent et feront pour nos amis les honneurs du
grand poète belge Verhaeren. Nous serons là.
J.P.